We zingen een programma met vroege Italiaanse barok in de gerestaureerde St-Catherine in Luik, op 24 september om 20 uur. Op het programma werken van onder meer Gabrieli, Monteverdi, Gesualdo en Carissimi. Van harte uitgenodigd! het programma heeft de titel CANTI ET SOSPIRI meegekregen, omdat het zowel jubelende als diep verzuchtende registers opent.

Een koorrepetitie in september 2022. We zingen met orgel, theorbe en viola da gamba

Hieronder een deel van de programmatekst (in het Frans).

CANTI E SOSPIRI. Musique sacrée italienne du XVII-ème siècle

Le programme présenté ici par l’Ensemble Vocal Marignan illustre le très beau répertoire sacré italien entre la Renaissance et la première période baroque. Il vous permettra d’apprécier les plus importants compositeurs italiens de la première moitié du dix-septième siècle, comme Giovanni Gabrieli (Venise), Carlo Gesualdo (Ferrare et Naples), Claudio Monteverdi (Cremona, Mantua et Venise), Agostino Agazzari (Sienne), Giacomo Benincasa (Rome) et Giacomo Carissimi (Assise et Rome).

Ces compositeurs se ne sont jamais rencontrés, probablement, mais il y avaient d’autres relations entre eux. Leurs partitions voyageaient, sans aucun doute ! Et puis le prince Gesualdo aimait voyager, incognito, pour observer ses collègues musiciens. Ainsi, pendant une visite à Venise en 1594, il a espionné son rival Gabrieli, l’incontestable maître de la polyphonie dans la tradition de Lassus. Les commentaires de Gesualdo n’étaient pas très généreux, il critiquait durement le ‘traditionalisme’ vénitien pour mettre en valeur sa propre musique, plus moderne, à la cour de Ferrare.  À la mort de Gabrieli en 1613, c’est Monteverdi qui lui succéda comme maestro di San Marco. Ce choix était surprenant, parce qu’à Venise les bons candidats ne manquaient pas et la réputation de Monteverdi était compromise, après des prestations largement critiquées à Milan et Modène. Mais il se reprit à Venise et y créa, dans un cadre stable qui a duré plus que 30 ans, une énorme production dans tous les genres.

Ce programme vous présente une sélection de motets et de psaumes de ces riches années de Venise, issus du volume Selva morale et spirituale (1641), une espèce d’œuvres complètes publiée vers la fin de sa vie. Quand Monteverdi mourut, en 1643, on invita Carissimi, le plus important compositeur de Rome, pour ce même poste de maestro di san Marco, mais celui déclina l’offre. Il avait déjà un très bon ensemble de chanteurs et de musiciens à sa disposition dans le collège des Jésuites à Rome et il ne voulait absolument pas s’éloigner de ses nombreux biens dans les campagnes autour de Rome. Ce qui montre qu’un compositeur de succès pouvait devenir bien riche dans ce siècle, la musique jouant un rôle très important dans tous les palais aristocratiques et ecclésiastiques. 

Les compositions sacrées que nous vous présentons aujourd’hui n’étaient pas destinées aux messes, mais à d’autres cérémonies religieuses : des vêpres, des réunions de confraternités ou des soirées dans les séminaires et collèges. Ce qui explique le caractère des pièces qui devaient surprendre, impressionner, amuser et divertir leur public composé des meilleures familles des villes, autour de grands personnages de cour.  Les motets et les psaumes à cinq, six ou huit voix, cherchaient donc des effets spéciaux, dans leur virtuosité, dans l’élaboration de leurs textes (avec un sens dramatique nouveau et beaucoup d’humour) et des changements imprévus de rythmes, d’intensité et d’harmonies. C’est ainsi que nous voyons naître, au début du dix-septième siècle, le style baroque. Avec une polyphonie spectaculaire d’émotions, une grande variation de couleurs musicales et, surtout, un précieux travail théâtral des textes.  Le jeu intérieur de la polyphonie, avec sa répétition presque mécanique des textes (comme chez Gabrieli) s’est doucement transformé dans une vraie et dramatique accentuation des textes. Les émotions ne restaient plus cachées, mais devenaient le cœur même de l’exécution musicale. Le chant était donc un grand soupir !

Dans ce programme vous rencontrerez ces fortes émotions dans chaque pièce : on découvre un tendre désir religieux chez Gabrieli (Beata es virgo Maria) et une profonde tristesse chez Gesualdo (si est dolor sicut dolor meus, s’il est douleur comme ma douleur) ; une touchante nostalgie chez Agazzari (dum recordaremur Sion, quant nous nous souvenons de Sion) et des attaques violentes de peur et de colère chez Carissimi (confregit in die irae, conquassavit capita, sur le terrible texte du psaume 110) ; des sentiments de grande sérénité dans une louange heureuse de Dieu avec le Confitebor tibi in toto corde meo (de tout cœur je célébrerai le  Seigneur) et enfin de vrais doutes existentiels (È la vita un lampo, la vie est une éclair) chez Monteverdi. Mais souvent aussi une infinie douceur (quando cor nostrum visitas, quant tu visites notre coeur) et un étonnant sens de l’humour, comme le montre la longue description, très comique, du scabellum pedum tuorum (l’escabeau de tes pieds) chez Carissimi. En Italie, en ce siècle du premier baroque, on chante donc de tout cœur et avec beaucoup d’esprit! 

Charles van Leeuwen